Directives européennes et gestion du risque immatériel
A l’aune de l’évolution de la crise sanitaire majeure que nous vivons, l’impact économique pour les entreprises françaises frappées de plein fouet par la baisse ou l’arrêt complet d’activité ou par les mesures drastiques de fermeture imposées par le confinement est lui aussi sans précédent. Pour les entreprises françaises, un enjeu essentiel se profile : tenter de juguler au maximum les retards ou défauts de paiement pour ainsi éviter les faillites ou liquidations en cascade.
Le socle sur lequel se basent les politiques de soutien aux entreprises et d’aménagement des échéances sociales ou fiscales repose pour partie sur les mesures exceptionnelles décidées en temps de crise mais également sur des directives européennes impactant la gestion du risque et de l’immatériel. Ainsi la directive européenne sur les délais de paiement, adoptée en 2011, prévoit que les Etats Membres adoptent des lois nationales pour réduire les délais de paiement contractuels inter-entreprises à 60 jours ouvrés maximum. Cette mesure a déjà été intégrée dans la LME française de 2008 qui établit des plafonds pour les délais de paiement contractuels à 45 jours fin de mois ou 60 jours à compter de la facture. La directive prévoit également des délais de paiement à 30 jours à réception de facture ou des marchandises entre pouvoirs publics et entreprises privées et la possibilité pour toute entreprise sujette à un défaut de paiement de réclamer des intérêts compensatoires. Cette mesure est cependant peu utilisée car les entreprises évaluent souvent le dommage réputationnel de la relation client-fournisseur avant de demander des intérêts compensatoires.
La crise actuelle a mis en lumière de façon cruciale l’impact négatif des délais et retards de paiement sur la trésorerie des entreprises françaises et la nécessité d’une harmonisation des pratiques européennes en la matière. La Commission Européenne travaille d’ailleurs sur le suivi de la transposition de ces mesures en droit national et organise régulièrement des échanges incluant des représentants nationaux, dont les acteurs de l’information d’entreprise et de la gestion du risque client.
Autre instrument européen utile aux entreprises en particulier dans la situation actuelle, la directive sur l’insolvabilité et la seconde chance a été révisée en 2019 et doit être transposée avant juillet 2021. Tout en laissant la possibilité aux États membres de conserver une certaine souplesse quant aux moyens les plus appropriés de mise en œuvre dans leurs contextes nationaux d’outils d’alerte précoce, elle doit permettre une meilleure harmonisation des mesures de restructuration et d’insolvabilité des États membres et de renforcer la culture du sauvetage des entreprises en difficulté dans l’Union Européenne. En permettant de détecter rapidement les circonstances dont pourraient découler une insolvabilité et d’y remédier en amont par des procédures ou mesures rapides visant à maintenir ou restructurer l’activité et éviter l’insolvabilité d’une entreprise, la directive renforce le rôle crucial de la prévention dans la gestion du risque immatériel des entreprises.
Stéphanie Verilhac Marzin, Directrice SVM Consult, spécialisée en affaires publiques et réglementaires européennes et françaises dans les secteurs du digital, de la publicité, de l’information d’entreprise et de la gestion du risque. Consultante en affaires réglementaires pour la FIGEC (Fédération Nationale de l’Information d’Entreprise, de la Gestion de Créances et de l’Enquête Civile) et pour la fédération européenne FEBIS